CONSEILS DU CŒUR

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Non-dualité et équanimité

522 Glimpse of Emptiness

522 Glimpse of Emptiness

La non-dualité, dans le sens d’Ajahn Buddhadasa*, c’est de transcender la dualité du bien et du mal, des sensations agréables et désagréables – couper la chaîne d’interdépendance* au niveau du contact (avec les objets des sens) !

La non-dualité de l’advaïta* védanta, selon ma compréhension, concernerait plutôt la non-dualité entre une personne séparée et la pure conscience, et ressemblerait à l’expérience du non-soi dans le bouddhisme (couper la chaîne de l’interdépendance au niveau de l’ignorance). La réalisation de la non-dualité est plus difficile à ce niveau qu’à celui du contact, car elle est le fruit de la grâce ou d’une expérience d’éveil. Alors que la non-dualité des sensations est une simple observation de l’attachement pour les sensations agréables (vouloir les conserver, les faire durer ou les obtenir) et de l’aversion pour les sensations désagréables (vouloir les faire cesser ou les éviter).

Il faut accepter les unes comme les autres quand elles apparaissent, sans les qualifier ni les juger, et les laisser ensuite se dissoudre, sans vouloir les retenir. Cesser de faire des efforts, juste laisser les choses apparaître et disparaître naturellement, sans préférences ni commentaires. Cette absence d’effort et d’intention est ressentie comme joie et tranquillité ; elle n’est pas un état positif par rapport à un autre état négatif, mais simplement l’état naturel, qu’on commence à percevoir comme l’état fondamental, l’arrière-plan, dans lequel les phénomènes apparaissent et disparaissent. Il est toujours là et apporte une grande sécurité quand on se rend compte qu’on ne peut pas le perdre, puisque c’est notre vraie nature. Il est toujours présent à la conscience (étant la conscience elle-même), même dans les moments difficiles de négativité ou d’agitation (comme le ciel est présent même quand il y a des nuages).

À ce moment-là, il faut cesser de séparer le positif (la présence, la tranquillité) et le négatif (les pensées, croyances et émotions), mais voir tout ce qui s’élève comme des ornements de la pure conscience, et réaliser le goût unique de la vacuité et des phénomènes, de la douleur et du plaisir, de la confusion et de la sagesse, du samsara* et du nirvana. C’est la sagesse de l’équanimité !


* Buddhadasa (Ajahn) (1906-1993) : ordonné moine à l’âge de vingt ans, Ajahn Buddhadasa fonda en 1932 le monastère de Suan Mokkh, qui fut le premier monastère de la forêt dédié à la méditation dans le sud de la Thaïlande. Son dernier projet, dans les années 1980, fut d’établir à Suan Mokkh un centre international de Dharma qui organise régulièrement des cours et des séminaires sur le bouddhisme et des retraites de méditation. Ajahn Buddhadasa fut, avec Ajahn Chah, un des maîtres thaïlandais les plus influents du vingtième siècle. J’ai eu la chance de suivre son enseignement de 1988 à 1993.

Chaîne d’interdépendance (pali : paticcasumuppada) : la loi de l’interdépendance – de l’origine conditionnée et interdépendante de tous les phénomènes – est, avec l’impersonnalité, un des fondements de la doctrine bouddhique. La loi de l’interdépendance est une des lois de la nature, à savoir que toutes choses – qu’elles fassent partie de l’environnement, de la société, de l’individu ou de l’esprit – sont interconnectées et ont entre elles des relations causales. Cette loi est généralement exprimée sous la forme d’un enchaînement de douze maillons – dont chacun est la conséquence du précédent et la cause du suivant – qui conduisent de l’ignorance à l’apparition de la souffrance. Le premier, l’ignorance, et le sixième, le contact (entre les organes et les objets des sens) sont les deux niveaux où il est possible de s’échapper du cycle de la souffrance et de l’existence conditionnée. 

Samsara (pali) : littér. transmigration perpétuelle. Désigne le cycle des renaissances – le monde conditionné dans lequel nous vivons – qui, tant que nous n’en avons pas perçu la nature illusoire et le considérons comme la seule réalité, est comparé par le Bouddha à un océan de souffrance.


10 mars 2015, Chiang Mai

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